OPC UA : POUR UNE INTEROPÉRABILITÉ ENTRE ÉQUIPEMENTS INDUSTRIELS

Michel Condemine - Président de l'association OPC UA France

Faire parler les machines, oui. Mais en quelle langue ?

Voici probablement l’un des enjeux principaux de l’industrie connectée. Pas facile en effet d’opérer des équipements de générations très différentes, dont les paradigmes informatiques et télécoms ont parfois plusieurs décennies d’écart.

Pourtant des solutions existent, et même une norme, OPC UA, choisie par le consortium Allemand « Industrie 4.0 ».

Un enjeu multiple : des télécoms aux modèles de données

Les outils industriels sont hétérogènes par nature, en particulier dans les protocoles de communication qu’ils embarquent, malgré plusieurs tentatives de standardisation. En cause, la durée de vie des équipements, des investissements conséquents qu’il faut bien rentabiliser, et bien sûr la concurrence des constructeurs, qui peinent à s’accorder (avec le soutien de leurs pays respectifs, qui voient dans la « guerre des normes » des opportunités pour leur balance commerciale). « L’interopérabilité est effectivement un sujet, car il existe plusieurs milliers de protocoles de communication dans le monde industriel, mais il ne faut pas oublier la sécurité, qui a longtemps été le parent pauvre de l’informatique industrielle, et surtout la compatibilité des modèles de données, qui me semble être la vraie priorité car elle touche vraiment le cœur de l’activité des industriels » recadre Michel Condemine, fondateur du cabinet 4CE Industry, et président de l’association OPC UA France.

Les solutions classiques dépassées ?

L’interconnexion des équipements (machines, automates, SCADA, MES…) a ainsi longtemps reposé sur le développement de logiciels à façon, de type middleware, exploitant des protocoles de communication bas niveau plus ou moins standardisés.

« Cela fonctionne bien, rassure Michel Condemine, Mais au prix fort ! En développement, en maintenance, en licences, et en compétences. De plus, les évolutions sont souvent compliquées à implémenter du fait de l’hétérogénéité des parcs : il y a toujours un automate de 30 ans, toujours bon pour le service, mais en « modbus » par exemple. On trouve facilement une centaine de protocoles telecom différents sur un même site industriel ! Il fallait donc installer et programmer des passerelles un peu partout… Les années 90 ont vu apparaître une belle progression, avec des protocoles plus intégrés, et prenant en compte des métadonnées, mais le plus souvent pour des activités très normées comme les GTB, la gestion de l’éclairage publique, ou des process industriels répandus. Mais à l’heure du big data et de l’IA, il faut désormais pouvoir connecter tous les systèmes entre eux : du moindre capteur de l’usine, à l’ERP du siège social » analyse Michel Condemine.

OPC UA à la rescousse

L’heure est donc à la convergence et on assiste dans ce contexte à l’émergence de l’OPC UA (OPC Unified Architecture) : un standard ouvert unifiant l’échange d’informations pour la communication industrielle. Cette technologie open source est gérée par une fondation (OPC Foundation) regroupant plus de 500 membres à l’échelle mondiale. « Attention, corrige Michel Condemine, OPC UA n’est plus un standard mais une véritable Norme[1], d’ailleurs obligatoire pour obtenir la certification « Industrie 4.0 ». C’est également bien plus qu’un protocole puisque qu’il inclut les couches « communication » et « information » (ndlr : voir illustration). Cela se traduit notamment par l’intégration dans OPC UA de modèles de données métiers prêts à l’usage, et bien sûr de la possibilité de créer ses propres modèles très facilement. Autrement dit, un projet OPC UA permet de se concentrer véritablement sur la « charge utile » des échanges d’informations, sans subir les contraintes informatique/telecom. Au bénéfice de l’opérationnel ».

Alors qu’OPC UA s’impose progressivement comme un standard au sein de l’usine, reste ensuite à faire sortir toutes ces données brutes en dehors de l’usine, pour en démultiplier la valeur. Les plateformes cloud de visualisation, d’analyse et d’aide à la décision offrent une aide précieuse. Mais leur plu value sera d’autant plus importante qu’elles sauront donner un sens opérationnel aux données dans l’usine, au plus près du terrain. Car l’intelligence des données se mesure à l’aune de leur impact opérationnel, du manager jusqu’à l’opérateur.

OPC UA en bref

  • Norme internationale depuis 2015
  • Sécurité embarquée conforme à l’état de l’art (normes en vigueur) : encryption, authentification…
  • Compatible avec les protocoles de transport
  • Classiques : TCP/IP, MQTT, AMQP…
  • Déterministes pour le machine to machine.
  • Pub/Sub, pour les applications cloud à grande échelle.
  • Modèles de données métiers embarqués.

Les modèles de données

Chaque métier utilise des unités, des pas de temps, des granularités, des métriques et ratios, ou encore des sémantiques différentes (nommage des données) qui forment un « modèle de données ». Certains secteurs d’activité ont d’ailleurs déjà normé leur modèles métiers, afin de faciliter l’interopérabilité opérationnelle des équipement et systèmes d’informations.

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