COMMENT DIGITALISER SES OPÉRATIONS DE MAINTENANCE PRÉVENTIVE ?

Arthur Cohen - Directeur Marketing & Communication

Quels sont les bénéfices d’une maintenance préventive connectée ?

Dans la majorité des cas, la maintenance préventive s’appuie sur les recommandations du fabricant des équipements. Elle est planifiée dans le temps et repose sur des contrôles périodiques du bon fonctionnement des machines.

Elle passe par le contrôle ou le remplacement des pièces selon un échéancier défini au préalable et nécessite les inspections de techniciens qualifiés sur les sites de production. Dans ses performances, ce système montre des limites. Pourquoi et comment l’optimiser ?

L’enjeu lié aux défaillances techniques

Pour de nombreuses entreprises industrielles, assurer une disponibilité maximale des équipements affectés à la production est un enjeu clé. En d’autres termes, il est essentiel d’anticiper les dysfonctionnements et les problèmes qui peuvent paralyser la production. C’est pourquoi la prévention est un pilier essentiel de toute stratégie de maintenance. À l’heure où les nouvelles technologies font leur entrée dans les sites de production, les processus de maintenance industrielle peuvent aussi gagner en efficacité.

Les écueils liés à la maintenance préventive traditionnelle : le cas de l’industrie hydroélectrique

C’est notamment le cas pour les usines hydroélectriques, où maintenir une disponibilité de production maximale s’avère complexe compte tenu de l’éclatement géographique sur de multiple sites de production qui peuvent ne pas avoir de connexion et ou il n’y a pas tout le temps de présence humaine.

De ce fait, en l’absence de remontées d’informations en temps réel, l’entreprise peut passer à côté de dégradations prévisibles qui, à terme, rendent un équipement indisponible (sur-utilisation d’une pièce donnant lieu à une usure prématurée, par exemple). Dans le cas d’une défaillance majeure, les temps d’arrêt de production peuvent s’étirer sur des périodes longues, allant parfois jusqu’à plusieurs semaines.

Les limites des GMAO non connectées

La maintenance « traditionnelle » est basée sur un recueil d’information manuel, qui donne lieu à des rapports papier. Ce type de procédure montre certaines limites car d’une part elle ne permet pas une remontée rapide et exhaustive des informations utiles. D’autre part, elle ne facilite ni le traçage des historiques, ni l’observation sur un temps long. Le recul fait défaut.

Cette maintenance préventive systématique s’avère également défaillante pour détecter suffisamment à l’avance les dégradations de l’outil de production ou identifier les points de vigilance à surveiller. En effet l’absence de connectivité ne permet pas de réaliser une expertise à distance, dont les résultats pourraient être communiqués avec profit aux techniciens de maintenance.

Pourquoi digitaliser la maintenance préventive ?

La transformation digitale de la maintenance préventive favorise au contraire la mise en œuvre de bonnes pratiques de surveillance. Connecter les équipements permet premièrement de mesurer l’usure réelle des équipements. Deuxièmement, l’accès aux données historiques de production aide à détecter les signes avant-coureurs de dysfonctionnement entrainant des pannes lourdes de conséquence. Un modèle de maintenance connectée permet ainsi d’ajuster la périodicité des interventions au regard des recommandations initiales du fabricant d’équipements et d’optimiser les coûts associés.

Une solution : la maintenance préventive connectée

Des données homogènes quel que soit le site de production

Afin d’effectuer une transition vers un système de maintenance connecté, plusieurs prérequis sont à considérer.

La collecte des données
Dans le cas de figure où le site est automatisé, il est nécessaire de recueillir les données de fonctionnement des équipements industriels, deux options simples sont envisageables :

  • Option 1 : Récupérer les données produites par les automates via un gateway IoT et/ou les capteurs, qui collecte et remonte ensuite les données dans le cloud
  • Option 2 : Si une base de données existe, se connecter aux systèmes de collecte déjà existant

L’uniformisation des données
Dans le cas d’une production éclatée sur différents sites, les équipements à connecter s’avèrent bien souvent hétérogènes (ancienneté, diversité des pièces, etc.). Il est alors nécessaire de créer un « dictionnaire » de données commun entre tous les sites afin d’assurer une correspondance homogène entre les variables recueillies d’un site à un autre. Ensuite, le déploiement s’effectue à deux niveaux.

Exemple de fiche de maintenance préventive digitalisée

Premier niveau : dématérialiser et optimiser la fréquence des opérations de maintenance

Dans un premier temps, la mise en œuvre d’une solution de maintenance préventive connectée passe par la dématérialisation de l’ensemble de la documentation et des fiches d’instructions relatives à la maintenance systématique fournies avec les appareils de production : définition du seuil de l’usure limite, préconisations de fréquence de remplacement des pièces, procédures de réparation, points particuliers à surveiller, etc. L’objectif est de passer en mode zéro papier.

Dans un deuxième temps, la digitalisation amène à la planification des opérations de maintenance en fonction de l’usage effectif des équipements, c’est-à-dire selon la mesure établie de leur usure réelle, et non pas selon une durée définie préalablement. Les paramètres appropriés sont pris en compte et intègrent, par exemple, le nombre exact d’heures de fonctionnement ainsi que son intensité.

Le changement de paradigme intervient au niveau la programmation des inspections. Elles ne sont plus uniquement calendaires. Elle sont centrées sur les besoins réels de l’usine hydroélectrique. Les visites des agents de maintenance et les remplacements des pièces sont programmés dans le cas où ces interventions sont vraiment nécessaires.

Visualisation des données de production pour faciliter la détection de signaux faibles

 

Second niveau : Détecter les signaux faibles

En l’absence de recul sur un temps long, il est difficile de détecter précisément des signaux faibles.

Bien souvent, les équipements n’ont pas la fonction requise pour assurer une rétention de données sur le long terme. En outre, les équipes de techniciens et agents de maintenance ne sont pas toujours en mesure de les constater sur les sites qui plus est lorsqu’il s’agit d’un événement dont la fréquence est importante.

Dans une usine hydroélectrique, ce type de surveillance peut s’appliquer sur de nombreux équipements. Par exemple, pour une vanne de garde pilotée par une centrale huile, il est pertinent de suivre les reprises de fuite. Il s’agit d’un évènement anodin et fréquent, mais qui peut conduire à des conséquences grave comme l’usure des vérins ou l’usure prématurée des pompes de commande. Pour des vannes de plusieurs mètres l’impact en terme de délai et de coût peut être très conséquent. Seule la mesure précise d’une fréquence trop élevée de cet événement nous indique la probabilité qu’un problème plus important peut arriver et qu’une inspection s’impose.

Une application terrain : pour les experts et les équipes de maintenance

L’intégration de ces signaux faibles au sein de l’application de maintenance connectée SMAP permet aux équipes de la SHEM, troisième producteur hydroélectrique français, d’exploiter plus efficacement les données collectées. L’application donne en premier lieu la capacité aux experts de modéliser le comportement physique de ces signaux faibles sur la base de règles métiers, sans avoir besoin de compétences de code. En second lieu, les experts peuvent assister les équipes sur le terrain par une analyse à distance des données et confirmer le diagnostic. Ainsi les rapports de maintenance préventive couplés à un système d’alertes intelligentes dispensés par l’application oriente les interventions des équipes afin de procéder à des remplacements préventifs et éviter ainsi de longues indisponibilités.

Techniciens de maintenance en intervention sur site

Des bénéfices sensibles

Une disponibilité accrue et plus d’énergie verte

Le déploiement d’une maintenance préventive connectée permet donc d’optimiser la fréquence des opérations tout en assurant une plus grande traçabilité des opérations effectuées. Ce suivi des signaux faibles a notamment permis d’éviter une avarie importante générant un gain de disponibilité entre 5 et 10%. Alors que l’eau est une force motrice accessible en continu, cela représente autant d’énergie renouvelable produite en plus.

De lourdes pertes évitées

En complément, l’intervention d’équipes de maintenance pour traiter les dysfonctionnements préalables à des pannes favorise la rentabilité des sites de production. C’est un bénéfice essentiel quand les chiffres montrent qu’une panne majeure entraînant un arrêt de production de plusieurs semaines peut impacter le revenu annuel d’une usine de 30 à 50 %.

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